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Page:Ségur - Un bon petit diable.djvu/47

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l’homme.

Pour ça non, Monsieur le juge, tout l’opposé. Madame est venue se jeter contre moi sur la route, au moment où je me tournais pour voir à mes chevaux ; elle est tombée les quatre fers en l’air ; faut croire qu’elle n’était pas solide sur ses jambes ; mais ça, je n’en suis pas fautif. Voilà que je veux la relever ; elle me repousse,… bonne poigne, allez !… et me dit des sottises ; elle m’en dit, m’en défile un chapelet qui m’ennuie à la fin ; ma foi, j’ai pris la parole à mon tour, et je ne dis pas que je n’en aie dit de salées ; on n’est pas charretier pour rien. Monsieur le juge sait bien ; les chevaux,… ça n’a pas l’oreille tendre. Et quand je m’emporte, ma foi, je lâche tout mon répertoire. Mais voilà que Madame, qui n’était pas contente, à ce qu’il semblerait, me lance une claque en pleine figure. Ma foi, pour le coup, la moutarde m’a monté au nez et… je suis prompt, Monsieur le juge,… pas méchant, mais prompt… Alors j’ai riposté… avec mon fouet… On n’est pas charretier pour rien, Monsieur le juge… Les chevaux, vous savez, ça se mène au fouet. Le malheur a voulu qu’elle présentât les yeux en face de mon fouet ; ma foi, il était lancé et il a touché là où il a trouvé de la résistance. Mais ça ne lui a pas fait grand mal, allez, Monsieur le juge ; elle a beuglé comme si je l’avais écorchée, mais elle y voit comme vous et moi ; la preuve, c’est qu’elle vous a vu entrer, et je me moque bien de ses dommages et intérêts ; je suis bien cer-