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une humanité qui ne veut pas périr

du soin de satisfaire des passions basses ou égoistes, ils avaient donné davantage à la culture de leur âme et leur moralité était à la hauteur de leur science. Après avoir expérimenté dans les âges précédents les diverses formes politiques entre lesquelles nous hésitons ici-bas, ils étaient arrivés à une organisation sociale rationnelle et simple où chacun tenait exactement la place que lui assuraient son degré d’intelligence et sa valeur morale.

Depuis de longs siècles déjà, avant même que le refroidissement de la surface les eût contraints de se réfugier dans leurs nouvelles demeures, ils s’étaient préoccupés de cet astre voisin dont le disque énorme flamboyait au-dessus de leurs têtes, dans l’orbite duquel ils se mouvaient, dont ils savaient que leur monde n’était que le modeste satellite. Ils avaient mesuré la distance qui les en séparait, et, grâce aux puissants instruments d’optique qu’ils avaient su construire bien avant nous, ils l’avaient attentivement observé et soigneusement étudié. Aucune des parties de sa surface n’avait échappé à leurs investigations et sa constitution leur était parfaitement connue.

Ils savaient, à n’en pas douter, que la Terre était habitée ; ils avaient même pu, dans une cerlaine mesure, y surprendre les développements de la vie. Ce qui s’était passé sur le globe qu’ils habitaient les avait renseignés sur l’histoire du globe terrestre. Ils avaient suivi de l’œil les transformations de sa surface ; ils avaient vu des continents surgir ou disparaître, les vastes forêts des âges préhistoriques diminuer avec les siècles. Les grands fleuves qui sillonnaient les continents terrestres leur étaient apparus ; ils avaient vu, dans les principales vallées ou à l’embouchure des cours d’eau les plus importants, se produire sur le sol des taches dont la couleur et l’aspect différaient des régions avoisinantes et où la perfection croissante de leurs instruments d’optique avait fini par leur faire reconnaître des agglomérations d’habitations humaines.

Avec les progrès qu’avaient accomplis chez eux les sciences astronomiques et aussi les sciences naturelles, disposant de forces considérables de la nature, le désir leur était venu bientôt d’en-