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un monde inconnu

C’est ainsi que le sage et savant Rugel, l’un des membres du Conseil, avait été placé auprès d’eux pour les préparer à la réception solennelle qui leur était réservée.

Intelligents comme ils l’étaient, ils n’avaient pas tardé à se familiariser avec la langue que parlaient les habitants de la Lune.

Cette langue, aux inflexions musicales et douces, était d’une extrême simplicité logique. La grammaire et la syntaxe, fondées sur des règles nettes et conformes aux lois mêmes de la pensée, dégagées de toute complication inutile et de toutes ces exceptions qui embarrassent nos langues européennes, étaient claires et faciles. Mais cette sobriété des formes essentielles n’excluait pas la richesse : le vocabulaire était abondant et chacune des nuances les plus délicates de la pensée trouvait pour l’exprimer un mot précis, facile à retenir, qui, le plus souvent, formait image et dont le son mélodieux charmait l’oreille.

Le même esprit d’exactitude méthodique présidait à l’écriture qui servait à représenter les mots de cette langue.

L’humanité lunaire ne présentait en effet qu’une race unique, toujours soumise aux mêmes influences de température et de milieu. Il n’avait donc jamais été parlé qu’un seul idiome qui était allé se perfectionnant à mesure que progressait la civilisation et que les conquêtes de la science apportaient à la pensée de nouveaux éléments. On ne rencontrait pas dans cette langue la variété de radicaux venus de sources différentes et ces chinoiseries d’orthographe que nous ont laissées tant d’idiomes disparus. Les mots étaient donc figurés tels qu’ils étaient prononcés par un petit nombre de caractères faciles à saisir et à tracer. Tout le monde parlait bien, tout le monde écrivait bien.

D’ailleurs, la curiosité des explorateurs était surexcitée par tout ce qu’ils voyaient, et le désir d’apprendre, déjà naturel à ces esprits d’élite, se trouvait singulièrement accru. Toutes les forces de leur intelligence se trouvaient tendues pour comprendre et admirer ce monde où tout leur semblait supérieur à ce qu’ils connaissaient.

Ils allaient d’étonnement en étonnement.

Cette humanité qui semblait, à force de science et de volonté, avoir conquis le droit de vivre dans un milieu étrange ; ces êtres