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un monde inconnu

moins considérable que celle qui existe sur la Terre entre les produits raffinés de nos civilisations européennes et les barbares grossiers qui errent dans la brousse de l’Afrique centrale ou dans les déserts de l’Australie.

D’un naturel doux et paisible, pénétrés dans une large mesure de l’amour du bien, du respect de la science et de l’ambition légitime de s’élever toujours plus haut, les Diémides — c’est-à-dire en langage lunaire ceux qui aspirent à une condition meilleure — acceptaient avec joie ces travaux qui servaient à l’utilité commune de la grande famille dont ils faisaient partie. Du reste, les incessantes découvertes des savants qui dérobaient chaque jour à la nature quelque nouveau secret, et qui employaient à leur usage, en les disciplinant, des forces qui nous sont encore inconnues, rendaient ces travaux toujours plus faciles et moins répugnants.

D’ingénieux procédés, des machines d’un mécanisme aussi simple que sûr permettaient d’extraire presque sans effort les matières premières que le sol fournissait en abondance, de fabriquer sans peine tous les objets utiles, et réduisaient à son minimum le travail de l’homme, dont le rôle se bornait à conduire et à surveiller la marche d’un outillage perfectionné.

D’ailleurs, le grand sentiment de justice et d’amour qui régnait dans cette société épurée rendait douce aux Diémides leur condition et réservait à chacun la perspective des plus précieuses récompenses. Là chacun tenait le rang que lui assignaient exactement son mérite et sa valeur morale. Quiconque par son intelligence, par les services rendus, par le bon exemple donné, se distinguait de ceux au rang desquels l’avait placé sa naissance, s’élevait d’autant dans l’échelle sociale : à tout progrès dans la dignité morale correspondait une élévation proportionnelle dans la dignité sociale. De cet ensemble de mœurs et d’institutions qui s’étaient librement et spontanément établies chez ces races naturellement portées au bien, était résultée une hiérarchie fixe quant aux démarcations qui séparaient les diverses classes, mais essentiellement mobile pour les individus, qui pouvaient toujours, par la continuité de leurs efforts, monter vers les classes supérieures.