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un monde inconnu

vait placé à proximité d’un énorme cylindre faisant saillie à l’intérieur de la coupole et terminé par une lentille sertie dans un tube métallique, semblable aux oculaires dont sont munis sur la Terre les instruments d’observation astronomiques

« Regardez, » leur dit-il.

Trois exclamations de surprise jaillirent à la fois :

« La France !

« Paris !

« London ! »

Grâce à la puissance des instruments mis à leur disposition, la Terre s’était rapprochée d’une incroyable façon ; elle était si près qu’on en distinguait tous les détails géographiques, comme si une vaste carte eût été étendue sous leurs regards : montagnes, forêts, fleuves, cités.

Un mécanisme précis permettait de faire mouvoir sans effort l’appareil et de le promener sur toute la surface éclairée du globe terrestre.

Et leur œil insatiable ne pouvait se détacher des lieux où ils avaient vécu.

Tandis que lord Rodilan fouillait la gigantesque ville de Londres, qui lui apparaissait comme une large tache grise rayée de fils imperceptibles qui devaient être des rues, et que coupait une ligne noirâtre, la Tamise, Marcel et Jacques, palpitants d’émotion, tenaient leurs regards obstinément fixés sur Paris. Bien que le grossissement fourni par ces merveilleux instruments et que Marcel estima à vingt mille fois environ, fût tel qu’on eût dû distinguer tous les monuments, l’épaisseur de l’atmosphère terrestre en diminuait singulièrement la netteté. Entre les observateurs et la surface de la Terre s’étendait comme un voile qui estompait les contours, faisait osciller les lignes et empêchait l’œil de se fixer.

Pour les astronomes de la Lune qui n’avaient pu, sur ces impressions troublées et incertaines, établir que des conjectures, il était difficile de se reconnaître dans ce milieu flottant ; mais Marcel et Jacques y retrouvaient facilement les lieux où ils avaient passé une si grande partie de leur vie et qu’ils connaissaient si bien. Quelques instants leur avaient suffi pour s’orienter ; ils distin-