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Page:Sélènes Pierre un monde inconnu 1896.djvu/300

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un monde inconnu

à un important travail sur lequel il désire consulter quelques-uns de ses collègues de l’Institut. »

La face du vieux savant s’illumina. S’il ne s’écria pas comme Archiméde : « Euréka ! » c’est qu’il n’y songea pas, mais il se frotta vigoureusement les mains.

« Voilà mon affaire, dit-il en bon français ; c’est bien la le seul homme qui puisse me comprendre et m’aider. » Sans retard, il se présenta chez l’auguste souverain qui, avec sa bonhomie habituelle, le reçut aussitôt.

Dans cette première entrevue, Mathieu-Rollère fit connaître à son impérial collègue tout ce qui s’était passé : le voyage accompli par Marcel et ses compagnons, l’apparition des lettres lumineuses sur le disque lunaire, les travaux déjà exécutés à l’observatoire de Long’s Peak pour ébaucher un commencement de communications. Il lui mit sous les yeux les télégrammes échangés avec l’honorable W. Burnett, et les plans déjà tracés pour tirer de tant d’héroïques efforts des conséquences utiles et durables.

L’empereur fut enthousiasmé.

Aussi, lorsque Mathieu-Rollère lui fit part de l’insuccès de ses combinaisons pour réaliser la somme nécessaire à un pareil travail, son bienveillant interlocuteur se montra-t-il avec empressement disposé à lui venir en aide.

Plusieurs conférences suivirent, dans lesquelles on examina avec attention tous les devis que l’ingénieur Dumesnil avait soigneusement dressés. Le total en était fort élevé : il dépassait 3 millions.

Dom Pedro fit la grimace.

« Peste ! dit-il, je ne suis pas un souverain assez riche pour me payer une telle fantaisie. La liste civile que m’octroient mes sujets et que mon parlement vote chaque année en rechignant, ne pourrait supporter un tel accroissement de dépenses. Ah ! mon cher ami, les monarques d’aujourd’hui sont de bien pauvres sires, et je songe quelquefois avec tristesse que votre grand roi Louis XIV, qui puisait à son gré dans la bourse de ses sujets, ne faisait pas tant de façons lorsqu’il s’agissait de faire jaillir du sol les merveilles de Versailles ou de Marly.