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Page:Sélènes Pierre un monde inconnu 1896.djvu/324

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un monde inconnu

les trois lettres M, J, R, au lieu de se montrer comme elles l’avaient fait jusque-là successivement, apparaissaient toutes ensemble ; elles ne brillaient pas d’une façon uniforme et continue pendant un temps déterminé, on les voyait s’éteindre et se rallumer précipitamment. Rien de régulier dans ces apparitions brusques et désordonnées. On eût dit que les mystérieux correspondants, pressés d’agir mais ne disposant pas encore de moyens plus complets, voulaient dire à leurs lointains amis : « Nous sommes là, nous vous avons vus ; un peu de patience et bientôt nous serons en mesure de vous répondre. »

Aussi les dépêches se succédaient-elles rapides et pressées entre Long’s Peak et Biskra.

Connaissant l’impatience de son collégue français, l’astronome américain lui disait : « Ayez confiance ; nos amis ont recu votre salut. L’agitation presque fébrile avec laquelle ils multiplient leurs démonstrations prouve que là-haut on se prépare avec ardeur. Nous touchons évidemment à la solution définitive du problème poursuivi. »

Et Mathieu-Rollère était dans un état d’exaltation que partageaient l’ingénieur Dumesnil, l’empereur don Pedro, et qui avait fini par gagner tous les Européens que la curiosilé avait groupés autour de lui. Les dépêches de sir W. Burnett étaient lues et commentées publiquement, communiquées à tous les journaux. Pendant les quelques nuits où les signaux faits sur la Lune restèrent encore visibles, les observateurs de Long’s Peak ne cessèrent de constater l’apparition irrégulière mais constante des lettres symboliques et d’entretenir ainsi les espérances de Mathieu-Rollère et de ses compagnons.

Un mois devait nécessairement se passer avant que le point de la surface lunaire, sur lequel se braquaient désespérément les télescopes et les lunettes du monde entier, redevint observable. Pendant ce délai force, toutes les chroniques scientifiques furent remplies d’interminables discussions, de théories indéfinies qui eurent pour résultat de tenir la curiosité publique en éveil.

De nouveaux visiteurs affluaient sans cesse dans le voisinage de Biskra, et une vie intense régnait maintenant dans toute cette