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Page:Sélènes Pierre un monde inconnu 1896.djvu/340

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un monde inconnu

qu’un long temps s’écoulerait encore avant que les habitants de la Terre fussent définitivement fixés sur la nature et les conditions de leurs frères de la Lune.

Marcel et ses deux compagnons avaient, dès le début, suivi avec intérêt cet échange de communications ; mais bientôt cette occupation était devenue impuissante à les satisfaire. Ils se rendaient fréquemment à l’endroit où, sous la conduite de savants expérimentés, les Diémides aménageaient le cratère qui devait servir de moule au canon libérateur. Mais là encore, malgré toute activité déployée, les choses marchaient lentement ; les difficultés à vaincre étaient considérables, et leur fièvre, que chaque jour d’attente surexcitait, leur rendait tout retard insupportable.

C’est alors que Marcel songea à entreprendre un voyage d’exploration destiné, dans sa pensée, à compléter ses études sur ce monde nouveau qu’il devait révéler à la Terre. Sans doute il avait bien eu sous les yeux des cartes dressées par les savants lunaires de cette partie mystérieuse du satellite qui se dérobe éternellement à la curiosité des observateurs terrestres ; il avait pu juger qu’elle était presque en tout semblable à la partie visible, aride comme elle, comme elle hérissée de montagnes et semée d’innombrables crateres.

Il savait que l’imagination seule de quelques rêveurs avait pu y supposer la présence de mers immenses, de profondes forêts, de fleuves rapides, toute une vie enfin dont l’hypothèse est en contradiction absolue avec la loi générale qui préside l’évolution des mondes. Mais il voulait s’en assurer par lui-même et apporter à ceux qu’il comptait bientôt rejoindre le témoignage de son expérience personnelle. Il voulait pouvoir dire : j’ai vu. Jacques et lord Rodilan accueillirent avec empressement cette proposition : elle répondait à leurs secrets désirs ; elle donnait une satisfaction à cette agitation sans but qui les empêchait de tenir en place.

On s’en ouvrit à Rugel, qui se montra tout disposé à les seconder dans cette entreprise, et s’offrit même à les accompagner.

« Ce projet est hardi, dit-il, et digne de votre courage ; et puisque vous êtes résolus à l’accomplir, nous pourrons peut-être