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un monde inconnu

Marcel s’était en effet préoccupé de cette question ; il avait refait les calculs de Barbicane et de Nicholl, et il était demeuré convaincu que le moyen imaginé par eux pour ralentir la rapidité de la chute de l’obus sur la surface lunaire était absolument insuffisant, étant donné surtout l’absence d’une atmosphère dont le projectile n’aurait pas à vaincre la résistance. Mais cette idée de fusées dont la déflagration devait en quelque sorte repousser l’obus et amortir sa chute, était ingénieusement trouvée. Marcel était résolu à s’y tenir ; il jugea utile seulement d’en augmenter le nombre et d’en aménager trois séries qui seraient mises en jeu à des intervalles calculés et en raison inverse de la distance à franchir. Il obtiendrait ainsi trois résistances successives qui, si ses calculs étaient justes (et il ne doutait pas de leur exactitude), devaient faire arriver les voyageurs sans choc trop violent au terme de leur course.

L’obus qui avait servi à la premiére expédition fut aussi l’objet d’un examen attentif. Il avait parfaitement résisté à la pression des gaz dont l’explosion l’avait projeté dans l’espace et à sa chute formidable dans les profondeurs du Pacifique. Les parois épaisses qui étaient, on se le rappelle, en aluminium pur et avaient la résistance d’un bloc plein, n’avaient pas subi de déformation appréciable. Les aménagements intérieurs seuls avaient fort souffert des injures du temps ; le capitonnage des murailles et du divan circulaire devait être complétement refait, et Marcel profita de cette circonstance pour faire remplacer les ressorts d’acier fin et résistant qui, avec le temps, s’étaient rouillés et avaient perdu de leur élasticité. Les verres lenticulaires des hublots et les châssis métalliques dans lesquels ils étaient encastrés durent également être renouvelés. Il fallut aussi rétablir les plaques de métal destinées à les protéger contre le choc du départ et que les précédents voyageurs avaient simplement rejetées au dehors. On refit enfin tous les récipients, caisses à eau et à vivres, réservoir à gaz, appareil de Reiset et Regnault destiné à fournir pendant le trajet un air toujours respirable.

Avec la certitude qu’il avait de rencontrer sur notre satellite des êtres vivants avec lesquels il lui serait possible d’entrer en communication intellectuelle, Marcel avait voulu, sinon les instruire ou les émerveiller, du moins leur faire connaître à quel degré de civilisa-