Page:Sénèque - Œuvres complètes, Tome 3, édition Rozoir, 1832.djvu/197

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ARGUMENT.

Ce traité s’adresse à tous les hommes qui tendent à perfectionner leur intelligence, et qui aspirent à la sagesse.

Sénèque s’élève d’abord (ch. i) contre l’injustice du vulgaire, et même d’hommes illustres qui se plaignent à tort de la brièveté de la vie : nous n’avons pas trop peu de temps, dit-il, nous en perdons trop. La nature (ch. ii) s’est montrée assez libérale envers nous. C’est seulement à nous à ne pas consumer notre vie dans le délire des passions, ni dans une suite d’occupations frivoles. On ne trouve personne (ch. iii) qui consente à partager avec autrui ce qu’il possède, et tous les hommes sont prodigues de leur temps, la seule chose dont il soit permis d’être avare. Qu’un vieillard, arrivé au terme de la vie la plus longue, se rappelle le temps que lui ont fait perdre ses créanciers, ses maîtresses, ses protecteurs, ses cliens, ses disputes avec sa femme, les maladies, etc., et il trouvera qu’il a vécu beaucoup moins d’années qu’il n’en compte. On entend dire tous les jours (ch. iv), Je me retirerai des affaires à cinquante, à soixante ans. Qui vous a donné l’assurance d’atteindre ce terme ? Quelle folie que d’attendre, pour commencer à vivre, le moment où il faut sortir de la vie ! L’auteur cite pour exemple de cette inconséquence (ch. v) l’empereur Auguste dont il dessine le règne en quelques traits rapides ; et Cicéron qui, inquiet même dans la prospérité, fut sans courage contre l’infortune, et qui se disait libre à demi dans sa retraite de Tusculum : propos bien peu digne d’un sage. Vient ensuite (ch. vi) le tribun Livius Drusus qui s’écriait que même étant enfant il ne s’était pas donné un seul jour de repos. L’homme trop occupé ne vit point. La vie entière n’est pas trop longue pour apprendre à vivre : elle ne l’est pas trop pour apprendre à mourir. Que de grands hommes ont renoncé, sur la fin de leurs jours, au tracas des affaires, pour s’instruire dans cette grande science ! Et plusieurs parmi eux sont sortis de la vie en reconnaissant qu’ils l’ignoraient encore. Cependant, le commun