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SUR LES BIENFAITS.
LIVRE II.
1.
Bis dat, qui cito dat. (P. Syrus.)

N’amendez pas toujours que du besoin pressé
Votre ami vous apporte un air embarrassé,
Et vous vienne expliquer d’une bouche interdite
L’humiliant détail du bien qu’il sollicite.
Prévenez un discours qui doit le chagriner ;
Pour aider ses besoins sachez les deviner.
Qu’il ignore avec vous les termes dont on prie,
Et sache tout au plus ceux dont on remercie.

(L’abbé de Villiers.)
2.
Rogare ingenuo servitus quodammodo est. (P. Syrus.)

La grâce s’affaiblit quand il faut qu’on l’attende ;
Tel pense l’acheter alors qu’il la demande ;
Et c’est je ne sais quoi d’abaissement secret,
Où quiconque a du cœur ne consent qu’à regret
C’est un terme honteux que celui de prière ;
Tu me l’as épargné, tu m’as fait grâce entière.
Ainsi l’honneur se mêle au bien que je reçois.
Qui donne comme toi donne plus d’une fois.
[…]
Sa façon de bien faire est un second bienfait.

(Corneille, Remerc. à Mazarin.)

3. « Ils ne sauroient obliger qu’en désobligeant, ni promettre qu’avec des yeux et des sourcils qui menacent. Ils accordent les faveurs et les courtoisies du mesme ton que les autres les refusent, »

(Balzac, Aristip. Disc. VII. )

4. « On a dit de quelques-uns qu’ils se faisoient si longtemps prier, qu’ils donnoient si sèchement et chargeoient une grâce qu’on leur arrachoit de conditions si désagréables, qu’une plus grande grâce étoit d’obtenir d’eux d’être dispensé de rien recevoir.» (La Bruyère, de la Cour.)

5.

Pour vrai amour ton amour je pourchasse,
De quoi ne m’as tant soit peu satisfait.
Grâce attendue est une ingrate grâce,
Et bien n’est bien s’il n’est promptement fait.

(François 1er)

« Les longues espérances usent la joie, comme les longues maladies usent la douleur. Vous avez dépensé tout le plaisir de me voir en m’at-