Page:Sénèque - Oeuvres complètes, trad Charpentier, Tome III, 1860.djvu/181

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rompre avec la nature et de lui renvoyer son présent. Au pied des autels, au milieu des sacrifices solennels pour la conservation de la vie, apprenez ce qu’est la mort. Les taureaux vigoureux succombent à une petite blessure ; ces animaux si grands et si robustes, un seul coup delà main de l’homme suffit pour les abattre. Le fer le plus mince peut trancher les liens des vertèbres, et dès que l’articulation qui joint le cou à la tête a été coupée, ces masses énormes tombent. La vie ne se cache pas dans une retraite bien profonde ; il n’est pas même besoin du fer pour l’en tirer ; il n’est pas besoin de blessures qui pénètrent les entrailles ; la mort est tout proche. Je n’ai pas^ marqué d’endroits pour ces sortes de coups, partout ils peuvent se porter. Ce qu’on appelle mourir, cet instant où l’âme se sépare du corps, est trop court, trop rapide pour être sensible. Soit qu’un nœud vous étrangle, soit que l’eau vous suffoque, soit que, par une chute violente, vous vous brisiez le crâne contre la terre, soit que vous avaliez des charbons ardents pour fermer le passage à la respiration refoulée sur elle-même, quel que soit le moyen, l’effet est prompt. Ne rougissez-vous pas de craindre si longtemps ce qui dure si peu ?