Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 1.pdf/507

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Page 229. J’entends résonner dans ma poitrine des gémissemens qui ne sont pas les miens. Crébillon, qui a eu le mauvais sens de mettre sur la scène cet horrible sujet, dont il n’a fait qu’une tragédie obscure et indigeste, n’a pas manqué de prendre dans Sénèque les traits les plus heureux, et c’est ce qu’il a fait de plus sage ; voici deux beaux vers qu’il doit à Sénèque :

De son fils tout sanglant, de son malheureux fils,
Je veux que dans son sein il entende les cris.

ATRÉE. Reconnais-tu tes enfans ? — THYESTE. Je reconnais mon frère ! Ce trait sublime brille comme une perle dans le fatras de Crébillon :

ATRÉE.

Reconnais-tu ce sang ?

THYESTE.

Je reconnais mon frère !

Page 235. Sans l’excès de ta douleur, mon crime serait perdu.

Par tes gémissemens je connais ta douleur ;
Comme je le voulais, tu ressens ton malheur :
Et mon cœur, qui perdait l’espoir de sa vengeance,
Retrouve dans tes pleurs son unique espérance.

(CRÉBILLON, Atrée et Thyeste, acte V, sc. 8.)

Page 237. Des enfans a leur père ! Nous avons voulu conserver toute la brièveté de cette exclamation déchirante ; il faut sous entendre le mot servir pour compléter la phrase.

Oui à leur père, et, ce qui me ravit, à leur véritable père. Atrée a dit, au deuxième acte, qu’il doutait de la légitimité de ses enfans : il se réjouit ici de la certitude qu’il a que ceux de Thyeste sont nés de lui, ce qui rend le malheur plus grand d’un côté, et la vengeance plus complète de l’autre.

Et ceux de l’hymen ? Thyeste avait séduit Érope et souillé la couche de son frère ; ce sont les dieux de l’hymen qui l’ont puni dans le festin d’Atrée.