Page:Sénèque - Tragédies, trad. Greslou, 1834, t. 2.pdf/391

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intuition précise qui lui faisait entrevoir la découverte de l’Amérique ; Sénèque était Espagnol, sa prophétie n’en est que plus frappante. Virgile, au reste, avait dit avant lui, dans son Pollion :

Alter erit tum Tiphys et altera que vehat Argo
Delectos Heroas….

Page 269. Thulé ne sera plus la borne du monde. Thulé était une île de l’Océan septentrional, et les anciens la regardaient comme la limite du monde.

Page 273. Si tu veux savoir, malheureuse, combien tu dois haïr. Ce n’est point ici une pensée déclamatoire comme il s’en rencontre beaucoup dans notre auteur. Médée nous paraît le type de ces natures puissantes, mais déréglées, pour qui la vie ordinaire est trop étroite, et dont tous les sentimens touchent au crime. Voyez plus haut comment notre héroïne raisonne tous ses projets de vengeance (page 237, acte Ier) ; sa haine doit se hausser au niveau de son amour.

Page 275. Cet homme si fier ne l’a pas osé. Dans la crainte sans doute de déplaire à Créon et à sa fille. Extimuit peut s’entendre aussi de la honte qui eût empêché Jason de se présenter devant Médée, après avoir fiancé une nouvelle épouse ; ou bien encore Médée veut dire que Jason a porté l’ingratitude à son égard jus- qu’à ne pas se donner la peine de venir lui parler une dernière fois. Nous disons en langage ordinaire : « Il a craint de se déranger. »

Page 277. Je fuis, Jason, je fuis. Longepierre a traduit tout ce passage avec beaucoup de succès. Voici ses vers :

L’exil, vous le savez, n’est pas nouveau pour moi :
J’ai su pour vous, Jason, m’en imposer la loi.
Sa cause est ce qui fait ma peine et ma disgrâce ;
Je fuyais pour Jason, et c’est lui qui me chasse.
N’importe ; obéissons aux lois de mon époux
Partons, puisqu’il le veut. Mais où m’envoyez-vous ?
Reverrai-je Colchos ? irai-je en Thessalie
Implorer les bontés des filles de Pélie ?
Irai-je sur le Phase, où mon père irrité.