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Page:Sénancour - Rêverie sur la nature primitive de l’homme, tome 1.djvu/81

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Mais nulle forme, nulle situation n’est permanente dans
la nature, toutes passent et s’altèrent. Comment resterions-

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nous invariables au sein de l’agitation, calmes au milieu
des orages, et toujours semblables dans un monde toujours
changé ? Heureux le mortel qui du moins repose souvent
dans cet état de félicité dont on ne sauroit rendre raison,
de calme indicible que nul objet extérieur ne peut donner,

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où l’on ne jouit de nulle chose en particulier ; où l’on ne
sauroit exprimer ce que l’on sent, ni dire ce qui rend heureux

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où il n’est rien | que l’on desire ni que l’on redoute ;
où le passé s’éloigne sans laisser de regrets, et l’avenir
s’avance libre d’alarmes ; où tout remplit le cœur, et rien

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ne l’afflige ; où tout bien est actuel et présent, tout mal
impuissant et éloigné ; où tout sentiment pénible est
étranger à notre être ; où tout sentiment d’admiration,
d’amour, de joie, de confiance, compose le sentiment [S 1] de
nous-mêmes.
  1. Que les plaisirs sont vains et les passions puériles aux yeux
    de l’homme ainsi content de posséder son être. Combien s’égarent
    ceux qui poursuivent au-dehors un bonheur toujours fugitif, et
    perdent pour son ombre instantanée, cette inestimable conscience
    5
    de soi-même qui allège ou annulle les maux, qui seule réalise les
    biens ; et sans qui les maux sont intolérables, et les biens
    illusoires.

    58-9*. Mais nulle situation n’est permanente ; comment – 62-4. Heureux du moins celui qui connoît ces momens de félicité ! C’est un calme – 64-6. donner, et où ne jouissant de nulle chose en particulier, l’on ne sauroit – 67-8. heureux. Il n’est rien que l’on poursuive, ou que l’on redoute ; le passé – 69. s’avance débarrassé de toute sollicitude ; tout – 70-1. afflige ; tout bien s’approche, tout mal paroît facile à surmonter ; tout sentiment – 71. devient étranger – 72. être ; tout – 72-3. d’admiration, d’espoir, de confiance – 73-74. sentiment de la vie. –N. 3, *l. 1-2. Les plaisirs sont inutiles à l’homme content – 2-6. être ; et il ne voit que de la puérilité dans les passions. Ceux-là s’égarent qui poursuivent loin d’eux-mêmes un bonheur fugitif, et qui perdent pour une ombre toujours errante cette inestimable conscience des forces de la vie qui seule allégeoit les maux, qui seule réalisoit les biens, et sans – 6. maux seront