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- le mal individuel n’existât point. Mais cela n’étoit-il pas
- hors de la nature des choses ? L’intelligence fait parfaitement,
- si elle fait le mieux possible. Ce n’est que lorsque
- vous supposez une puissance indépendante de toute nécessité,
- que vous vous mettez dans une entière impossibilité
- de concevoir l’existence du mal sans recourir à des
- suppositions tout à fait gratuites, dont vous tirez des
- conséquences arbitraires ; moyens féconds en effet pour
- répondre à toutes les difficultés.
- Et quelles sont nos lumières pour raisonner sur le mal
- absolu ? Sans doute il n’y a de mauvais que ce qui est
- contraire à la fin proposée : le mal c’est la discordance,
- ou l’obstacle. Comme nous ne connoissons point l’ordre
- du monde, nous ne savons pas s’il y a discordance :
- comme nous ne pouvons connoître la fin du monde, nous
- ne saurons jamais s’il y a obstacle.
- Il est vraisemblable que tout ce que nous connoissons
- est indifférent dans la nature. Pour estimer des rapports,
- il faut en connoître l’objet. Si telle chose est bonne dans
- la société, nous le savons ; car la société forme un tout,
- et nous pouvons discerner ce qui est contraire à sa fin.
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- Mais | que cette même chose soit bonne ou mauvaise dans
- l’univers, c’est ce que nous ne saurions même entrevoir :
- car nous ignorons essentiellement quel est le principe, le
- lien et l’objet de l’univers.
- C’est un étrange aveuglement de prétendre que le
- monde est la copie de l’homme, et que la moralité de
- l’homme est celle de l’être absolu. Cependant nous
- reconnoissons la fausseté de ces analogies, quand nous ne
- pensons pas que l’intérêt de nos systèmes nous défende de
- les abandonner. Vous ne dites pas ; ce lion est criminel, il
- a voulu me dévorer ; mais vous dites, Dieu seroit injuste
- s’il avoit fait le lion carnivore avant que l’homme eût