Cette page n’a pas encore été corrigée
- hardiesse qui semble les éclaircir, les mystères que sa pensée
- veut pénétrer. Possédant tous les talens, celui de la
- facilité la plus aimable, comme celui d’une force mâle, il
- chante le coq ainsi que le coq se chanteroit lui-même dans
- sa jactance presque héroïque ; il découvre les accens que
- le tigre voudroit produire pour imprimer une terreur plus
- grande ; c’est dans les desseins de la nature même, qu’il
- voit le cheval beau comme elle l’a fait, et le lion magnanime
- comme elle l’a voulu. Mais ce qui est plus difficile,
- il connoît l’homme ; il l’observe dans les extrêmes ; il le
- suit dans sa grandeur, et le rappelle au noble rang que la
- raison lui destine ; il en dit toutes les misères, et le fait
- frémir de sa foiblesse abandonnée dans les sables
- arabiques ; il sait également intéresser ses affections au chant
- du rouge-gorge, et livrer à son intelligence les hypothèses
- de la formation du monde……
- Dans les mouvemens gracieux d’une facilité indépendante
- et sans ambition, le génie de Montesquieu fit
- descendre le voile oriental sur les traits sévères de la
- vérité. Les Lettres Persannes préparoient un grand
[316]
- ouvrage : mais là, Montesquieu | se contenta de
- s’indiquer lui-même. Dans ce simple rayon de célébrité,
- dont il lui suffisoit alors d’éclairer son nom, le sentiment
- de ses forces lui découvroit le crépuscule de l’immortalité.
- L’Esprit des Lois la lui donna. Des vues étendues,
- plusieurs recherches savantes, une pensée énergique, des
- traits rapides, une négligence majestueuse, et souvent
- une admirable justesse d’expression caractérisent cette
- conception grande et utile.
- Moins vaste dans son objet, mais admirable dans les
- détails et parfait dans l’exécution, le beau livre sur les
- Causes de la Grandeur et de la Décadence des Romains,
- avoit déjà placé Montesquieu au rang des écrivains à qui