Page:Séverin - Théodore Weustenraad, poète belge, 1914.djvu/70

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ans plus tard, ils devaient se prêter si complaisamment.

On démêle sans peine les raisons de cette attitude. J’ai indiqué tantôt la principale. Je crois en trouver une autre dans les sentiments que les Français professaient pour nous à cette époque : on voit par moments percer, dans les articles que leurs écrivains nous consacrent, un sans-façon, un dédain, un mépris même, qui devaient piquer au vif nos ancêtres. Ces articles étaient-ils bienveillants ? Leur bienveillance avait quelque chose de protecteur et n’était guère moins désobligeante. La Belgique était traitée tantôt comme une Béotie, tantôt comme une province française momentanément détachée de la mère-patrie. La « contrefaçon littéraire », pratiquée chez nous au détriment des auteurs français, donnait lieu à des attaques très vives et assez justifiées d’ailleurs, dans leurs journaux et leurs revues. Enfin il faudrait ignorer la nature humaine pour croire que les Belges, en 1835, devaient être fort reconnaissants aux Français de leur intervention en 1831 et en 1832, qui n’avait sauvé la Belgique qu’en faisant éclater sa faiblesse militaire ; d’autant plus que cette intervention, il est à peine nécessaire de le dire, n’avait pas été absolument désintéressée.

L’Association nationale ne voulait pas seulement soustraire notre littérature à l’influence étrangère. Son ambition était plus haute. Elle prétendait que notre