Page:Séverine - Notes d'une frondeuse, 1894.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA MAISON DU COIN DU QUAI


Avant-hier, les députés ont failli ne pas tenir séance, n’étant guère plus de huit douzaines, disséminés sur les bancs de l’hémicycle comme hannetons sur les premières feuilles.

Malheureusement, on a passé outre. La Chambre a perdu là une belle occasion d’être utile, en se suicidant pour un jour.

C’était toujours vingt-quatre heures de gagnées — et — en vingt-quatre heures sait-on jamais ce qui pourra éclore, dans ce Paris exquis et fou ?

Oh ! cette Chambre !…

J’ai passé là des heures, qui toujours m’ont semblé brèves, à écouter, non pas ce qui se disait à la tribune — à quoi bon ? — mais ce qui se disait autour de moi, dans le public ; à regarder, non point les visages d’honorables qui s’efforcent de ressembler à leur photographie, mais les bonnes faces étonnées et curieuses des naïfs qui, entrés avec respect, sortaient avec colère… une colère gouailleuse parfois, qui avait des mots à l’emporte-pièce et des trouvailles de génie !