haut de ce grand mât blanc, planté derrière la maison, flottait le drapeau tricolore. J’ai vu plus d’un Français tressaillir, en le regardant.
D’ici, on distingue, émergeant des cimes d’arbres, le triple toit d’un vaste châlet recouvert de tuiles gaies, plaqué de majoliques, avec des loggias à vitrail, des auvents de bois ajouré, des balconnades, toute la fantaisie spirituelle d’un artiste pliant la matière à sa guise, la pétrissant, en faisant jaillir l’imprévu.
En arrière, autour, s’étagent un tas de petites annexes amusantes : kiosque de repos, volière et pigeonnier, abri en tonne de Heidelberg, serre… et jusqu’à un minuscule temple grec à colonnes brisées !
Au fur et mesure que le cheval descend la côte, au fur et mesure que nous avançons sur la route qui suit parallèlement la grève, la façade se dégage mieux. De la mer à elle, nul obstacle. Un pré herbu, dépendant de la propriété, va de la chaussée au sentier planté de peupliers, qui borde la très basse muraille exhaussée d’arbustes — garant ainsi la vue, pour l’avenir, de toute ingérence étrangère, de toute fâcheuse obstruction.
Et plus on approche, plus je m’étonne de la légende de luxe et de folie attachée à cette retraite ; c’est coquet, sans nul doute, mais il n’est pas un peintre un peu arrivé qui n’en possède autant, sur la côte de Sainte-Adresse ou le coteau de Saint-Cloud.
Par un chemin couvert, voûté de feuillage, nous sommes arrivés devant une grille Renaissance, joliment ouvragée, à un seul battant. Et sur le cartouche dédoré, faisant fronton, où une inscription gothique s’efface, je lis :
« Il n’est rose sans épines ».