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NOTES D’UNE FRONDEUSE

les vendeurs), un autre comptoir s’étend, sur lequel sont disposés les céramiques ; les bijoux ; les rares pièces en argent « vrai » ; un faisceau dénoué de yatagans, cimeterres, fusils arabes, que l’on va, tout à l’heure, se disputer.

Enfin, contre la quatrième paroi — l’envers de la maison donnant sur cette cour changée en salle de ventes — sont suspendus trois cadres dans l’ordre suivant : 1o un paysage de E. Marot : des moutons que ramène leur berger ; 2o le portrait du général par E. Bœtzel, grand dessin au fusain, qui fut exposé aussi au Palais de l’Industrie en 1886 ; 3o une copie de la Cruche cassée, de Greuze, de mêmes dimensions que l’original.

Et c’est tout ; les enchères vont commencer.

Elles débutent par une série de photographies, eaux-fortes, gravures, souvenirs sans aucune espèce de valeur pour le commun des mortels, mais qui émeuvent aux larmes les Ligueurs présents.

C’est que chaque objet leur rappelle une date, un effort, un incident ; ils font leurs choux-gras de ces vétilles pas chères — et beaucoup, je le vois bien, essaient de ravoir ce qu’ils ont donné.

On remonte ainsi du no 58 au no 34 du catalogue ; sans qu’il y ait rien d’autre à noter que les deux héliogravures sur soie, de J. Goliard, et l’eau-forte (portrait du général, toujours !), par Belleuvret, qu’a achetés le correspondant de l’Intransigeant, Deneuvillers. Les héliogravures surtout sont curieuses, avec leur nuance rose-pâle imprimée de noir. C’est le menu d’un dîner que la Ligue des Patriotes offrit à Boulanger. Il signa le sien… et vous pensez si on l’a racheté !