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NOTES D’UNE FRONDEUSE

d’Épinal ou les refrains de beuglants, le général Boulanger !

C’est bon pour M. Quesnay de Beaurepaire de raconter que les cent mille hommes de la gare de Lyon étaient payés ! J’y étais, moi, je les ai vus… ils étaient rudement sincères, allez !

J’en connaissais pas mal que j’avais vus dans les meetings, à droite, à gauche. Ils passaient en courant, tenant à la main — c’était la sortie de l’ouvrage — leur boîte de menuisier, leur sac de zingueur ; beaucoup avaient encore la serpillère de toile verte attachée au ventre.

J’en appelai un ou deux par leur nom, étonnée de les voir là.

Ils répondaient, ralentissant à peine le pas :

— La Sociale est trop longue à venir ; et nous en avons plein le dos, de la République à Ferry ! Vive Boulanger !

C’était des soudoyés, n’est-ce pas ?

Mais allez donc dire cela à qui écrit des choses dans ce goût-ci :

« Ce qu’on veut, ce qu’on cherche, c’est un homme d’action, un homme résolu, prêt à recommencer ce qui marchait si bien, l’an dernier, et ce qui s’est trouvé tout à coup arrêté par la défaillance inattendue que vous savez. Le pays a été profondément remué par cette aventure sans issue, et peut-être y a-t-il encore en l’air une foule d’atomes crochus, qu’on pourrait attirer, amalgamer et concentrer autour d’une même cause. Seulement, il faut quelqu’un qui plaise, quelqu’un qui agisse, quelqu’un qui ait figure de prétendant ou d’aventurier. »

Et, naturellement, on représente la réaction et la