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NOTES D’UNE FRONDEUSE

Et voilà que les mêmes clameurs s’élèvent, avec une variante terrible : « Où est l’argent ? » Voilà que vous vous trouvez englobé dans un bien plus affreux scandale : car il ne relève pas que de la politique, mais de la probité — et vous êtes innocent… comme l’autre l’était, de presque tout ce dont l’accusa le réquisitoire, le fameux réquisitoire de la Haute-Cour !

Je vous plains, et de grand cœur ! Car peut-être en vous, comme en l’autre, aux heures de la défaite, un être nouveau s’éveille-t-il ; et la source d’où jaillissent les pleurs a-t-elle fait éclore la fleur d’indulgence, sans laquelle il n’est pas d’âme complète, ni de vraie philosophie.

Voyez, ô politiciens ! Même ceux qui paraissent le plus sûrs d’eux, son atteints en leurs proches, voient s’écrouler leurs orgueils. On répond de soi-même — net encore ! Qui peut répondre d’un être à côté : de l’allié, du parent, de l’ami ? Celui-ci tombe par son gendre, celui-là par son frère, un autre par son cousin, son oncle, son beau-père…

C’est injuste, certes oui ! Mais elles sont vôtres, ces mœurs-là ! Tant qu’elles régneront, nul (s’il n’est seul !) n’est sûr d’être invincible ; que son tour ne viendra pas demain.

Regardez — et que celui qui est sans péché, ose, désormais, jeter la première pierre !