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1672


est à Rosny avec le sien ; la Castelnau[1] est chez la Louvigny ; la maréchale[2] est seule, comme une tourterelle. D’Hacqueville s’en va en Bretagne. Si vous avez envie de savoir autre chose, mandez-lui — car pour nous, notre vie est très-triste et très-languissante. On croit que Maestricht est investi ; rien n’est encore assuré. Adieu, mon ange, je vous baise, et vous embrasse d’une tendresse qui ne peut recevoir de comparaison.

J’ai vu Gautier[3] : il est un peu malcontent que vous ne lui faites pas seulement un mot de réponse. Plût à Dieu qu’il eût une partie de ce que vous avez perdu au jeu !

Croyez que vous ne sauriez être aimée de personne, tout aimable que vous êtes, si véritablement que vous l’êtes de moi.


  1. 13. Louise-Marie Foucault, fille du comte de Daugnon, maréchal de France, et femme de Michel marquis de Castelnau, fils du maréchal ; elle perdit son mari le 2 décembre suivant. Elle mourut en 1709. — Sa belle-mère, la maréchale, était « Marie de Girard, qui avait épousé, en 1642, Jacques marquis de Castelnau, officier du plus grand mérite qui s’était signalé tout jeune à Fribourg et à Nortlingen, lieutenant général en 1655, puis maréchal en 1658, après la bataille des Dunes, où il commandait une aile de l’armée française, mort peu après de ses blessures à trente-huit ans. Mme de Castelnau est très-maltraitée par Tallemant (tome VI, p. 27 et suivantes). » (M. Cousin, Madame de Sablé, p. 485, note 2.) Elle mourut à plus de quatre-vingts ans, en 1696. Voyez sur elle la lettre du 15 octobre 1677, et dans le même tome de Tallemant des Réaux, p. 36, une note de M. Paulin Paris.
  2. 14. Perrin (1734) a ajouté entre parenthèses : de Castelnau.
  3. 15. Gautier ou Gaultier était un marchand d’étoffes de soie, d’or et d’argent de la rue des Bourdonnais. La Bruyère l’a nommé dans ses Caractères (chapitre de la ville, no 18) : « L’utile et la louable pratique de perdre en frais de noces le tiers de la dot qu’une femme apporte ! de commencer par s’appauvrir de concert par l’amas et l’entassement de choses superflues, et de prendre déjà sur son fonds de quoi payer Gaultier, les meubles et la toilette ! »