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NOTICE BIOGRAPHIQUE


vardin. Nous voyons seulement quelles étaient, dans cette famille, les habitudes d’intimité de madame de Sévigné, puisqu’en 1671, elle dînait tous les vendredis chez l’évêque du Mans, beau-frère de madame de Lavardin, en compagnie de la Rochefoucauld, de Benserade et de madame de Brissac[1]. C’est ce qu’elle appelait dîner en bavardin. Les noms de la marquise de Lavardin et de l’évêque son beau-frère sont parmi ceux des amis qui signèrent au contrat de madame de Grignan, en 1669. Nous remontons plus loin encore dans cette liaison par Costar, archidiacre de l’évêché du Mans, qui, en 1652, eut occasion, chez M. de Lavardin, de voir madame de Sévigné, avec qui il fut depuis en correspondance[2]. La connaissance de madame de Lavardin et de madame de Sévigné doit s’être faite par M. de Sévigné : car les Beaumanoir de Lavardin étaient une illustre famille bretonne. On connaît le maréchal de Lavardin sous Henri IV et sous Louis XIII. Le mari de la marquise, qu’elle avait perdu au siège de Gravelines en 1641, avait été maréchal des camps et armées du roi. Son fils fut lieutenant général au gouvernement de Bretagne. Il est surtout connu par son ambassade de Rome, où il fut excommunié par Innocent XI. Il épousa en secondes noces une sœur du duc et du cardinal de Noailles. Il est à peine besoin de dire qu’il était fort lié aussi avec madame de Sévigné. Elle ne fait point l’éloge de ses plaisanteries, ni de ses manières, mais ce qui vaut mieux, de ses vertus. « C’est, dit-elle, le moins lâche et le moins bas courtisan que j’aie jamais vu. » Saint-Simon le dépeint comme « un gros homme extrêmement laid, de beaucoup d’esprit et fort orné[3]. » Il ajoute qu’on l’accusait d’être avare, difficile à vivre, et « d’avoir hérité de la lèpre des Rostaing, dont étoit sa mère. » Il est remarquable en effet que, malgré son amitié pour la marquise de Lavardin, madame de Sévigné lui reproche les mêmes défauts. « Cette mère, dit-elle, est impérieuse ; » et elle raconte plaisamment comment on s’y prit, au mariage de son fils, pour exorciser le démon de l’avarice qui était en elle[4].

  1. Lettre à madame de Grignan 11 mars et 17 avril 1671.
  2. Walckenaer, IIe partie des Mémoires, p. 167.
  3. Mémoires, tome III, p. 209.
  4. Lettre à madame de Grignan 12 juin 1680.