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XIX
AVERTISSEMENT DES ÉDITEURS.

Mon fils est à Paris ; il y sera peu : la cour est de retour, il ne faut pas qu’il se montre. C’est une perte qui me paroît bien considérable que celle de M. le le Duc d’Anjou. On me mande que ma petite-enfant est fort jolie ; que sa nourrice en a beaucoup de soin, et que ce petit ménage va en perfection. Je prétends le trouver tout établi chez moi à Paris ; c’est une chose ridicule que les petites entrailles que je sens déjà pour cette petite personne. Mme de Villars m’écrit assez souvent, et me parle toujours de vous : elle est tendre, elle sait bien aimer ; elle comprend les sentiments que j’ai pour vous : cela me donne de l’amitié pour elle ; elle me prie de vous faire mille douceurs de sa part : sa lettre est pleine d’estime et de tendresse ; répondez-y par une petite demi-feuille que je lui puisse envoyer. Ce détour est beau pour aller jusques à elle ; mais pour les affaires pressées que vous avez ensemble, il n’est pas besoin d’une plus grande diligence. La petite Saint-Géran m’écrit des pieds de mouche que je ne saurais lire : je lui réponds des rudesses et des injures qui la divertissent, et moi aussi. Cette mauvaise plaisanterie n’est point encore usée ; quand elle le sera, je ne dirai plus rien, car je m’ennuierois fort d’un autre style avec elle.

Mon fils est à Paris ; il y sera peu : la cour est de retour, il ne faut pas qu’il se montre. C’est une perte qui me paroît bien considérable que celle de M. le duc d’Anjou.

Mme de Villars m’écrit assez souvent, et me parle toujours de vous : elle est tendre et sait bien aimer ;

cela me donne de l’amitié pour elle. Elle me prie de vous dire mille douceurs de sa part ; sa lettre est pleine d’estime et de tendresse pour vous ; répondez-y par une petite demi-feuille que je lui puisse envoyer.

La petite Saint-Géran m’écrit des pieds de mouche que je ne saurois lire ; je lui réponds des rudesses et des injures, qui la divertissent ; cette méchante plaisanterie n’est point encore usée ; quand elle le sera, je ne dirai plus rien, car je m’ennuierois fort d’un autre style avec elle.

Nous lisons toujours le Tasse avec plaisir ; je suis assurée que vous le souffririez, si vous étiez en tiers : il y a bien de la différence entre lire un livre toute seule, ou avec des gens qui entendent et relèvent les beaux endroits et qui par là réveillent l’attention. Cette Morale de Nicole est admirable, et Cléopatre son train, sans em—

Nous lisons toujours le Tasse avec plaisir ; je suis assurée que vous le souffririez, si vous étiez en tiers : il y a une grande différence entre lire un livre toute seule, ou avec des gens qui relèvent les beaux endroits et qui réveillent l’attention. Cette Morale de Nicole est admirable, et Cléopatre va son train, mais sans empressement et aux