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1654

chère, en attendant que les troupes soient assemblées pour entrer en Catalogne. Je vous réponds, ma belle cousine, que vous entendrez parler de moi cette campagne.

Adieu, ma belle cousine, songez quelquefois à moi, et que vous n’avez ni parent ni ami qui vous aime tant que je fais. Je voudrois… non, je n’achèverai pas, de peur de vous déplaire, mais vous pouvez bien savoir ce que je voudrois.


25. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN
À MADAME DE SÉVIGNÉ.

La réponse que me fit la marquise de Sévigné à la lettre du 16e juin a été perdue. On en connoîtra bien le dommage par la lettre que je lui écrivis six semaines après.

À Figuières, le 30e juillet 1654.

Mon Dieu, que vous avez d’esprit, ma cousine, que vous écrivez bien, que vous êtes aimable ! Il faut avouer qu’étant aussi prude que vous l’êtes, vous m’avez grande obligation que je ne vous aime pas plus que je fais. Ma foi, j’ai bien de la peine à me retenir. Tantôt je condamne votre insensibilité, tantôt je l’excuse. Mais je vous excuse toujours : j’ai tant de raisons de ne vous pas déplaire en cette rencontre ; mais j’en ai de si fortes de vous désobéir. Quoi ! vous me flattez, ma cousine, vous me dites des douceurs, et vous ne voulez pas que j’aie les dernières tendresses pour vous ! Eh bien, je ne les aurai pas : il faut bien vouloir ce que vous voulez, et vous aimer à votre mode ; mais vous répondrez un jour devant Dieu de la violence que je me fais, et des maux qui s’en ensuivront.

Au reste, Madame, vous me mandez qu’après que