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1655

celui-ci donna du bout de ses gants sur le chapeau de l’autre. M. le Cardinal étoit alors à l’armée ; il défendit a Humières, de la part du Roi, d’en avoir aucun ressentiment ; mais la Châtre[1], son beau-frère, fit appeler Nogent par un gentilhomme de ses parents appelé Sainte-Fère, lieutenant d’Humières. Nogent ne voulut point se battre, et dit depuis qu’il n’avoit tenu qu’à Sainte-Fère qu’il n’eût satisfait la Châtre. Il y a huit jours que Sainte-Fère lui faisant un éclaircissement là-dessus, Nogent le traita de petit mignon, ne lui voulant donner satisfaction aucune. Sainte-Fère, qui tenoit un fouet de postillon à la main, lui en donna quelques coups. Nogent dit n’avoir point été frappé, et qu’Humières l’a voulu faire assassiner. Humières dit qu’il n’a aucune part à cela, que véritablement, s’il avoit cru être offensé, il auroit fait donner cent coups de bâton à Nogent par un de ses domestiques, et il dit même qu’il veut bien que Nogent croie que c’est lui qui lui a fait faire cette insulte.


35. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN
À MADAME DE SÉVIGNÉ.

La campagne de 1655 étant finie, je vins attendre à Noyon les ordres du quartier d’hiver, et en les attendant, j’écrivis cette lettre à la marquise.

À Noyon, ce 7e novembre 1655.

J’attends ici la venue du Messie, Madame, c’est-à-dire les ordres du quartier d’hiver, avec une grande impa-

  1. Il s’agit de Louis de la Châtre, comte de Nançay, dit le marquis de la Châtre, mort en 1664 ; et non, comme on l’a cru, d’Edme de la Châtre, son père, auteur des Mémoires, colonel général des Suisses, amant de Ninon, mort en 1645.