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1664 d’un nommé Saint-Mars[1], qui est fort honnête homme, et qui prendra cinquante soldats pour le garder. Je ne sais si on lui a donné un autre valet de chambre. Si vous saviez comme cette cruauté paroît à tout le monde, de lui avoir ôté ces deux hommes, Pecquet et Lavalée : c’est une chose inconcevable ; on en tire même des conséquences fâcheuses, dont Dieu le préservera, comme il a fait jusqu’ici. Il faut mettre sa confiance en lui, et le laisser sous sa protection, qui lui a été si salutaire. On lui refuse toujours sa femme. On a obtenu que la mère n’ira qu’au Parc, chez sa fille, qui en est abbesse[2]. L’écuyer[3] suivra sa belle-sœur ; il a déclaré qu’il n’avoit pas de quoi se nourrir ailleurs. M. et Mme de Charost vont toujours à Ancenis. M. Bailly, avocat général[4], a été chassé pour avoir dit à Gisaucourt, devant le jugement du procès, qu’il devroit bien remettre la compagnie du grand conseil en honneur, et qu’elle seroit bien déshonorée si Chamillard, Pussort et lui alloient le même train. Cela me fâche à cause de vous ; voilà une grande rigueur


Tantæne animis cœlestibus iræ ?[5]


  1. Bénigne d’Auvergne de Saint-Mars était alors maréchal des logis des mousquetaires. Il mourut gouverneur de la Bastille, le 26 septembre 1708
  2. Marie-Élisabeth Foucquet, sœur du surintendant, abbesse du Parc-aux-Dames, près de Senlis.
  3. Gilles Foucquet, premier écuyer du Roi, frère du surintendant, reçut ordre de se retirer à Montluçon avec la femme et la mère du condamné. Voyez la lettre suivante.
  4. « M. Bailly, avocat général au grand conseil, qu’on dit avoir insulté à quelqu’un des juges en faisant sollicitation en qualité de parent de M. Foucquet, a reçu commandement de se retirer en son abbaye de Château-Thierry. » (Œuvres de M. Foucquet, tome XVI, p. 355.)
  5. Virgile, Énéide, liv. I, v. ii :
    Tant de fiel entre-t-il dans les âmes des dieux ?
    (Trad. de Delille.)