Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 1.djvu/75

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
45
SUR MADAME DE SÉVIGNÉ.


une cousine faite comme vous, je me trompe fort ou la paix se ferait, à quelque prix que ce fût. Tant y a que je la ferais, moi, si j’étais en sa place ; car, sur ma foi, je vous aime fort. »

Peu de jours après avoir écrit cette lettre, qui est du 5 mars 1649, Bussy, à la faveur de la paix qui venait d’être conclue entre la cour et le Parlement, était au Temple, chez son oncle le grand prieur, et pouvait de vive voix conter à sa cousine toutes les douceurs parfois très gaillardes que nous l’avons vu se permettre dans ses lettres. Il resta sans doute quelques mois à Paris, depuis les premiers jours d’avril jusque vers le mois d’août ; car il paraît, d’après ses Mémoires, que ce fut seulement au commencement de ce dernier mois que, sous prétexte d’affaires, il se rendit en Bourgogne, afin d’éluder l’ordre qu’il avait reçu du prince de Condé de faire marcher sa compagnie en Flandre[1]. Ce fut le plus long séjour qu’il fît à Paris cette année-là ; il n’y demeura au contraire que très peu lorsque, au mois de novembre, il y revint, mandé par le prince de Condé, qui voulait lui faire vendre au comte de Guitaut sa charge de lieutenant. Toutefois, si longtemps qu’il soit resté dans le voisinage de madame de Sévigné, immédiatement après la paix du 1er avril 1649, ce n’est pas à ce moment, mais en 1650, qu’il conçut le plus d’espoir de séduire sa cousine, et crut avoir trouvé l’occasion de parvenir à ses fins par un abus perfide des confidences d’un ami. Il place lui-même l’histoire de cette trahison six mois avant le duel de Sévigné[2]. Comme sa façon de dater, surtout les événements de ce genre, n’est pas tout à fait rigoureuse, il n’est pas douteux qu’il ne faille remonter jusqu’au mois de juin 1650, avant le temps où il alla se jeter dans Montrond. Plus tard, dans cette même année, quand il revint deux fois à Paris, pour conférer avec le duc de Nemours, ce fut pour quelques jours seulement, et réduit à se tenir rigoureusement caché[3] ; tandis que, depuis le commencement de 1650 jusqu’à la fin de juin, il se trouva près de Sévigné et de sa femme. Le 15 janvier 1650, il était

  1. Mémoires de Bussy, tome I, p. 186, 187.
  2. Histoire amoureuse, tome II des Mémoires, p. 431.
  3. Mémoires de Bussy, tome I, p. 201 et 203.