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SUR MADAME DE SIMIANE. i3

LETTRE DU CHEVALIER DE PERRIN A MADAME DE SIMIANE1. A Paris, le 12 février 1737.

JE vois, Madame, avec tout le chagrin que vous pouvez

imaginer, l’inquiétude que cette suite des lettres de Mme de Sévigné vous cause. Il ne m’appartient pas de vous dire que cette inquiétude est mal fondée; mais j’ose vous assurer que l’édition des quatre premiers volumes étant une fois, publiée, plusieurs raisons m’ont obligé à ne la pas laisser imparfaite. Ces raisons ne peuvent guère s’expliquer ni se faire entendre par lettre, et si l’éloignement de Paris à Aix étoit moins grand, je serois peut-être déjà parti pour vous aller rendre le compte le plus exact et le plus net de la conduite que j’ai tenue dans cette affaire, sur laquelle je me flatte que vous me trouveriez aussi irréprochable que je fais profession de l’être en toute autre chose. J’espère cependant que je satisferai là-dessus ma délicatesse car enfin je ne serai pas tranquille tant que je croirai n’avoir plus la même place dans l’honneur de votre confiance et de votre amitié, qui me sont l’une et l’autre si précieuses. Au surplus, Madame, vous jugez bien que dans l’état où sont les choses, je voudrois pour beaucoup qu’il n’eût jamais été question de faire imprimer les lettres de Mme de Sévigné, et que, malgré le ménagement des termes de votre lettre, je ne laisse pas d’en sentir toute la force, et d’en être mortifié comme je le dois. Je puis même vous assurer que si j’étois encore le maître de retirer les deux derniers volumes des lettres qui doivent paroître, je le ferois sans hésiter un instant; mais comme je n’ai point fait les frais de l’impression, il ne dépend plus de moi de supprimer cette suite, que je voudrois pouvoir racheter à quel prix que ce fût, puisqu’elle donne lieu à de nouveaux regrets, qui me touchent au delà de ce que je puis vous dire. Au surplus, Madame, je crois qu’il ne conviendroit pas d’en faire mention dans l’avertissement que je me propose de mettre à la tête de ces deux derniers volumes, puisque je tâche d’y prouver que ces lettres conviennent à toutes sortes 1. Nous donnons cette lettre d’après l’original autographe de

Perrin.