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185. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, dimanche 19e juillet[1].

Je ne vois point, ma bonne, que vous ayez reçu mes lettres du 17e et 21e juin ; je vous écris toujours deux fois la semaine, ce m’est une joie et une consolation ; je reçois le vendredi deux de vos lettres qui me soutiennent le cœur toute la semaine. J’ai trouvé fort plaisant de recevoir celle que vous m’adressez dans la Capucine[2], justement dans le beau milieu de la Capucine. Il faisoit beau ; j’attendois mon laquais qui devoit m’apporter vos lettres de Vitré. Après avoir bien fait des tours, je revenois au logis.

Je vous trouve bien en famille de tous côtés, et je vous vois très-bien faire les honneurs de votre maison. Je vous assure que cette manière est plus noble et plus aimable qu’une froide insensibilité, qui sied très-mal quand on est chez soi. Vous en êtes bien éloignée, ma bonne, et l’on ne peut pas mieux faire que ce que vous faites : je vous souhaite seulement des matériaux ; car, pour de la bonne volonté, vous en avez de reste.

Vous aurez trouvé plaisant que je vous aie tant parlé du Coadjuteur, dans le temps qu’il est avec vous : je n’avois pas bien vu sa goutte en vous écrivant. Ah ! Seigneur Corbeau, si vous n’aviez demandé, pour toute nécessité, qu’un poco di pane, un poco di vino[3], vous n’en seriez point où vous en êtes : il faut souffrir la goutte quand on

  1. Lettre 185. — 1. Cette lettre est datée du 3 juillet dans les éditions de 1726 et dans celle de 1734 ; du 19 juillet, dans l’édition de 1754. Le premier alinéa manque dans les deux éditions de Perrin.
  2. 2. Maisonnette du parc des Rochers.
  3. 3. Un peu de pain, un peu de vin.