Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 2.djvu/8

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le dites, vous devez être l’homme du monde le plus content. Vous le serez sans doute beaucoup du commerce que vous avez avec ma fille : il me paroît très-vif de sa part. Je ne crois point qu’on puisse plus vous aimer qu’elle vous aime. Pour moi, j’espère que je vous la rendrai saine et entière, avec un petit enfant de même, ou j’y brûlerai mes livres. Il est vrai que je ne suis pas habile, mais je sais bien demander conseil, et le suivre ; et ma fille de son côté contribue fort à sa conservation.

J’ai mille compliments à vous faire de M. de la Rochefoucauld et de son fils[1] ; ils ont reçu tous les vôtres. Mme de la Fayette vous rend mille grâces de votre souvenir, aussi bien que ma tante[2], et mon abbé[3], qui aime votre femme de tout son cœur : ce n’est pas peu, car si elle n’étoit pas bien raisonnable, il la haïroit le plus franchement du monde.

Si l’occasion vous vient de rendre quelque service à un gentilhomme de votre pays, qui s’appelle Valcroissant[4], je vous conjure de le faire : vous ne me sauriez donner une marque plus agréable de votre amitié. Vous m’avez

  1. Le prince de Marsillac, né en 1634, mort en 1714, grand maître de la garde-robe (1672), et grand veneur de France.
  2. La marquise de la Trousse. Voyez la note 14 de la lettre 26.
  3. Christophe de Coulanges, abbé de Livry.
  4. Le chevalier de Perrin et tous les éditeurs après lui avaient laissé ce nom en blanc. Walckenaer (tome III, p. 295) nous apprend que ce gentilhomme si dévoué à Foucquet s’appelait Valcroissant. Accompagné d’un écuyer du surintendant, nommé la Forest, il avait pénétré dans le château de Pignerol, et essayé de suborner des soldats de la compagnie du gouverneur. Ces menées furent découvertes ; leurs auteurs parvinrent à s’enfuir en Savoie, où Saint-Mars les fit arrêter. La Forest fut pendu, et Valcroissant, traduit devant le conseil souverain de Pignerol, fut condamné à cinq ans de galères. Mme de Sévigné et Mlle de Scudéry écrivirent au maréchal de Vivonne, général des galères, qui sollicita la grâce de Valcroissant auprès du Roi, et lui obtint une commutation de peine. Voyez la