été sur le point de s’en aller et que vous n’ayez pas été ravie de vous en défaire. Quel bizarre raccommodement ! À quoi vous sert-il ? Quelle foiblesse ! Vous avez Pommier qui vous donne la main, et l’autre vous morgue et gagne votre argent au jeu[1] : où aviez-vous mis votre bon esprit ?
Je crois, ma bonne, que l’amitié que j’ai pour vous et l’intérêt que je prends à tout ce qui vous touche, vous doit faire recevoir agréablement ce que je vous dis. Mandez-moi si je me trompe.
1672
292. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.
Enfin, ma fille, notre chère tante a fini sa malheureuse vie. La pauvre femme nous a bien fait pleurer dans cette triste occasion ; et pour moi, qui suis tendre aux larmes, j’en ai beaucoup répandu. Elle mourut hier matin à quatre heures, sans que personne s’en aperçût : on la trouva morte dans son lit. La veille, elle étoit extraordinairement mal, et par inquiétude elle voulut se lever ; elle étoit si foible, qu’elle ne pouvoit se tenir dans sa chaise, et s’affaissoit et couloit jusqu’à terre ; on la relevoit. Mlle de la Trousse se flattoit, et trouvoit que c’étoit qu’elle avoit besoin de nourriture. Elle avoit des convulsions à la bouche : elle disoit[2] que c’étoit un embarras que le lait avoit fait dans sa bouche et dans ses