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celui d’y être, je n’y ai passé que huit jours de cette année ; Paris me tue. Si vous saviez comme je ferois ma cour à des gens à qui il est très-bon de la faire, d’écrire souvent toutes sortes de folies, et combien je leur en écris peu, vous jugeriez aisément que je ne fais pas ce que je veux là-dessus.

Il y a aujourd’hui trois ans que je vis mourir Madame[1] ; je relus hier plusieurs de ses lettres, je suis toute pleine d’elle. Adieu, ma très-chère, vos défiances seules composent votre unique défaut, et la seule chose qui peut me déplaire en vous. M. de la Rochefoucauld vous écrira.


1673

324. — DE MADAME DE LA FAYETTE À MADAME DE SÉVIGNÉ.

À Paris, le 14e juillet.

Voici ce que j’ai fait depuis que je ne vous ai écrit : j’ai eu deux accès de fièvre. Il y a six mois que je n’ai été purgée : on me purge une fois, on me purge deux ; le lendemain de la deuxième je me mets à table : ah, ah ! j’ai mal au cœur, je ne veux point de potage. — Mangez donc un peu de viande. — Non, je n’en veux point. — Mais vous mangerez du fruit ? — Je crois qu’oui. — Eh bien, mangez-en donc. — Je ne saurois, je mangerai tantôt ; que l’on m’ait ce soir un potage et un poulet. Voici le soir, voilà un potage et un poulet ; je n’en veux point ; je suis dégoûtée, je m’en vais me coucher, j’aime mieux dormir que de manger. Je me couche, je me tourne,

  1. 3. Le lundi 30 juin 1670. « Elle expira à deux heures et demie du matin, et neuf heures après avoir commencé à se trouver mal. » (Histoire de Madame Henriette, par Mme de la Fayette, tome LXIV, p. 461.)