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J’admire que le petit mal de M. de Grignan ait prospéré au point que vous le mandez, c’est-à-dire qu’il faut prendre garde en Provence au pli de sa chaussette. Je souhaite qu’il se porte bien, et que la fièvre le quitte, car il faut mettre flamberge au vent : je hais fort cette petite guerre[1].

Je reviens à vos trois hommes que vous devez aimer très-solidement : ils n’ont tous que vos affaires dans la tête, ils ont trouvé à qui parler, et notre conférence a duré jusqu’à midi. La Garde m’assure fort de l’amitié de M. de Pompone : ils sont tous contents de lui.

Si vous me demandez ce qu’on dit à Paris, et de quoi il est question, je vous dirai que l’on n’y parle que de M. et de Mme de Grignan, de leurs affaires, de leurs intérêts, de leur retour : enfin jusqu’ici je ne me suis pas aperçue qu’il s’agisse d’autre chose. Les bonnes têtes vous diront ce qu’il leur semble de votre retour ; je ne veux pas que vous m’en croyiez, croyez-en M. de la Garde. Nous avons examiné combien de choses vous doivent obliger de venir rajuster ce qu’a dérangé votre bon ami[2], et envers le maître, et envers tous les principaux ; enfin il n’y a point de porte où il n’ait heurté, et rien qu’il n’ait ébranlé par ses discours, dont le fond est du poison chamarré d’un faux agrément. Il sera bon même de dire tout haut que vous venez, et vous l’y trouverez peut-être encore, car il a dit qu’il reviendra, et c’est alors que M. de Pompone et tous vos amis vous attendent pour régler vos allures à l’avenir. Tant que vous serez éloignés, vous leur échapperez toujours ; et en vérité celui qui parle ici a trop d’avantage sur celui qui ne dit mot.

  1. 5. Tout se préparait pour le siège d’Orange. Voyez la Notice, p. 131.
  2. 6. L’évêque de Marseille.