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Le désintéressement dont vous voulez que je vous loue dans le conseil que vous me donnez n’est pas si estimable qu’il l’auroit été du temps de notre belle jeunesse : peut-être qu’en ce temps-là vous auriez eu plus de mérite. Quoi qu’il en soit, je me porte bien, et si je meurs de cette maladie, ce sera d’une belle épée, et je vous laisserai le soin de mon épitaphe.

Que dites-vous de nos victoires ? Je n’entends jamais parler de guerre que je ne pense à vous. Votre charge vacante[1] m’a frappé le cœur. Vous savez de qui elle est remplie. Ce marquis de Renel[2] n’étoit-il pas de vos amis et de vos alliés ? Quand je vous vois chez vous dans le temps où nous sommes, j’admire le bonheur du Roi de se pouvoir passer de tant de braves gens qu’il laisse inutiles.

Nous avons tant perdu à cette victoire[3], que sans le

    raison qui m’a empêchée de prévenir ces vapeurs par les remèdes que vous me proposez, m’empêchera encore d’en user pour les guérir. »

  1. 2. La charge de mestre de camp général de la cavalerie légère qu’avait eue Bussy, et après lui le chevalier de Fourilles. Celui-ci venait d’être blessé à mort à la bataille de Senef, et eut pour successeur le marquis de Renel.
  2. 3. Louis de Clermont d’Amboise, troisième du nom, marquis de Renel, fut nommé mestre de camp général de la cavalerie légère, après le combat de Senef, où il « fut blessé d’un assez grand coup, faisant très-bien son devoir. » (Gazette du 22 août.) Il fut emporté d’un coup de canon, au siège de Cambrai, le 11 avril 1677. Il était frère puîné de Clériadus (voyez tome I, p. 413, note 4), et aîné de Just, chevalier de Renel, qui fut aussi blessé après Senef ; ce dernier, qui était en 1675 brigadier général dans l’armée de Turenne, mourut à soixante-six ans, en février 1702.
  3. 4. De Senef. — Dans le manuscrit de l’Institut : « Cette victoire nous coûte si cher que… et les drapeaux, etc. » — Le Te Deum fut chanté à Notre-Dame le 22 août. « La compagnie des Cent-Suisses, dit la Gazette du 29, alla prendre au palais des Tuileries cent sept drapeaux ou étendards, de ceux qui ont été gagnés en ce combat de Senef, pour les porter en ladite église de Notre-Dame, où