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1675
qu’un à tous deux avec qui vous pussiez parler de M. de Turenne. Les Villars vous adorent ; Villars[1] est revenu ; mais Saint-Géran et sa tête[2] sont demeurés : sa femme espéroit qu’on auroit quelque pitié de lui, et qu’on le ramèneroit. Je crois que la Garde vous mande le dessein qu’il a de vous aller voir : j’ai bien envie de lui dire adieu pour ce voyage ; le mien, comme vous savez, est un peu différé : il faut voir l’effet que fera dans notre pays la marche de six mille hommes et des deux Provençaux[3]. Il est bien dur à M. de Lavardin d’avoir acheté une charge quatre cent mille francs, pour obéir à M. de Fourbin ; car encore M. de Chaulnes a l’ombre du commandement[4]. Mme de Lavardin et M. d’Harouys sont mes boussoles. Ne soyez point en peine de moi, ma très-chère, ni de ma santé ; je me purgerai après le plein de la lune, et quand on aura des nouvelles d’Allemagne.

Adieu, ma chère enfant, je vous embrasse tendrement, et je vous aime si passionnément, que je ne pense pas qu’on puisse aller plus loin. Si quelqu’un souhaitoit mon amitié, il devroit être content que je l’aimasse seulement autant que j’aime votre portrait.

  1. Probablement le fils de l’ambassadeur, le futur maréchal.
  2. Voyez au tome III, p. 408, la note 3 de la lettre du 22 mai 1674.
  3. Le bailli de Forbin et le marquis de Vins. Voyez la lettre précédente, tome III, p. 540. — Dans son édition de 1754, Perrin, qui dans cette lettre a tout particulièrement soigné les détails du style, a ainsi modifié la fin de cette phrase : « de six mille hommes commandés par deux Provençaux. »
  4. « Conserve l’ombre du commandement. » (Édition de 1754.)