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Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 4.djvu/147

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1675Prince ne se battra que quand il voudra : voilà l’avantage des bons joueurs d’échecs.

M. de Coulanges s’en va à Lyon : il me mande qu’il a laissé votre portrait en gage, faute d’argent, à un de ses marchands. Le joli portrait ! j’aime fort la bonne peinture, mais je vous avoue que votre ressemblance ne nuit pas à me le faire aimer.

Vous avez raison d’approuver le bruit qui court que je vais en Provence : en bonne justice, ne devroit-on pas suivre les sentiments de son cœur, quand ils sont aussi vifs et aussi justes que les miens ? Ah ! quelle folie et en disant cela, me voici à Nantes. Je vous plaindrai quand vous serez au bout de vos cinq mois du séjour de Grignan. Aix et Lambesc me plaisent moins que la liberté de ce château. Vous avez fait toutes vos visites, vous voilà bien. Je n’ai point écrit à cette princesse[1] sur la mort de son fils : que fait-on à ces malheurs-là ? Et Vardes, et mon ami Corbinelli, que sont-ils devenus ? Le fils de Félix[2] est évêque d’Apt ou de Gap.

Songez, ma fille, que je reçois vos lettres le neuvième

  1. Mme de Sévigné parle probablement d’Anne d’Ornano, femme du comte d’Harcourt, de la maison de Lorraine, mère du prince d’Harcourt et tante du comte de Grignan ; son second fils César, comte de Montlaur, avait été tué le 27 juillet précédent.
  2. Henri Félix de Tassy, fils de Charles-François Félix, premier chirurgien du Roi, était trésorier de la Sainte-Chapelle de Vincennes. Il n’eut ni l’un ni l’autre de ces évêchés, mais bien celui de Digne, vacant par la nomination de Jean de Vintimille au siège de Toulon, en septembre 1675. Il fut sacré évêque de Digne le 6 décembre 1676, et passa l’année suivante à l’évêché de Chalon-sur-Saône.