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1675jour ; je vous dis cela, fuor di proposito[1], pour vous ôter l’idée que je suis aux antipodes. La pauvre Vaubrun est toujours dans l’abîme de la douleur : je suis bien de votre sentiment, il y a de certaines douleurs dont on ne doit point se consoler, ni revoir le monde[2] : il faut tirer les verrous sur soi, comme disoit notre bon cardinal. Le petit cardinal[3] a bien son oncle dans le cœur. Je me suis fort moquée du service de Notre-Dame[4] après celui de Saint-Denis. Vous pouvez resserrer vos mouchoirs, je ne vous ferai plus pleurer. Je reviens encore sur l’âme de Cavoie[5] : la mienne n’en étoit pas contente à Paris ; il étoit à la cour, et se portoit bien : nous dira-t-il qu’il craignoit de pleurer ? Le pauvre petit ! voilà un grand malheur. Je voudrois que vous eussiez vu Barillon et le bonhomme Boucherat[6].

Adieu, ma très-chère, je vous embrasse tendrement : ne le croyez-vous pas, et ne voyez-vous point combien je vous aime ?

  1. Hors de propos.
  2. Dans l’édition de 1754 : « Et qui empêchent de revoir le monde. »
  3. Le cardinal de Bouillon.
  4. La Gazette, dans la relation, déjà mentionnée, de la cérémonie de Notre-Dame, dit en terminant la description de l’appareil funèbre que « les choses avoient été ainsi disposées par les soins d’un bel esprit de la compagnie des jésuites, » et qu’on en peut « voir tout le détail dans l’imprimé qu’il en a donné au public. » — Ce bel esprit est le P. Ménestrier. Son écrit, publié en 1675, est intitulé : Les vertus chrétiennes et les vertus militaires en deuil. Dessein de l’appareil funèbre dressé par ordre du Roi dans l’église de Notre-Dame de Paris, le 9° septembre 1675, pour la cérémonie des obsèques de très-haut et très puissant prince Monseigneur Henry de la Tour d’Auvergne, vicomte de Turenne, in-4o, de 28 pages.
  5. Voyez la lettre du 30 août précédent, p. 107
  6. L’édition de 1754 donne seule ce morceau, depuis : « Je reviens encore, etc. » La phrase qui le précède et celle qui termine la lettre ne sont que dans l’édition de 1734.