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1675lieues d’ici, à la Guerche[1], sans oser approcher de moi : j’eusse parié d’avance qu’il n’y fût pas venu. Ma fille, il y a des gens qui vont et d’autres qui ne vont pas, Fourbin et lui ont touché le cœur de deux dames de Rennes ; elles sont sœurs : ce sont les marquises de G* et de C* ; ce sont de constantes amours :


Nos champs n’ont point de fleurs plus passagères ;


mais on ne veut pas perdre la saison d’aimer[2].

Mme de Lavardin m’envoie ses relations de Paris ; c’est une plaisante chose ; mais ses commerces sont agréables : c’est la marquise d’Uxelles, l’abbé de la Victoire, et Longueil[3] et quelques autres. Ce dernier lui mande en propres termes que M. de Mirepoix est le plus infâme et le plus méchant homme du monde ; que non-seulement il nie d’avoir rien touché, pour se mettre avec eux dans le rang des créanciers ; mais qu’il en suppose sous des noms empruntés, et leur redemande encore pour vingt mille francs de pierreries qu’il dit avoir laissées à Grignon[4] dans un petit cabinet[5] qui ne vaut pas neuf francs, et où ils n’ont jamais trouvé qu’une vilaine paire de souliers de sa vilaine femme. Cependant les exploits leur tombent sur la tête, et ils croient que par les friponneries de ce juif ils perdront beaucoup, et lui en son particulier tient ses

  1. La Guerche est un chef-lieu de canton de l’arrondissement de Vitré.
  2. On lit dans la dernière scène de l’Alceste de Quinault :

    Le sort de la beauté nous doit alarmer !
    Nos champs n’ont point de fleur plus passagère ;
    C’est la saison d’aimer.

  3. Sur l’abbé de la Victoire, voyez tome II, p. 84, note 4 ; sur Longueil, tome III, p. 202, note 7.
  4. Bellièvre était marquis de Grignon. Voyez tome III, p. 513, note 2.
  5. Petit meuble à tiroirs, buffet à plusieurs compartiments.