1675et vous voyez même que nous donnons trois millions, comme si nous ne donnions rien du tout ; nous nous mettons au-dessus de la petite circonstance de ne les pouvoir payer nous la traitons de bagatelle. Vous me demandez si tout de bon nous sommes ruinés ; oui et non si nous voulions ne point partir d’ici, nous y vivons pour rien, parce que rien ne se vend ; mais il est vrai que pour de l’argent, il n’y en a plus dans cette province.
À MADAME DE GRIGNAN.
Il faut s’y accoutumer, ma fille : je reçois vos deux paquets à la fois ; la saison a dérangé un de nos jours de poste, et c’est le plus grand mal qu’elle me puisse faire ; je me moque du froid, de la neige, de la gelée et de ses autres désagréments. M. de Coulanges est à Paris ; j’en ai reçu une grande lettre très-gaillarde : il veut aussi vous écrire ; ses plumes me paroissent bien taillées, il ne demande qu’à les exercer. Nous nous disons les uns aux autres : où est mon fils ? il y a longtemps qu’il est parti de l’armée : il n’est point à Paris ; où pourroit-il être ? Pour moi, je n’en suis point en peine, et je suis assurée qu’il chante vêpres auprès de sa jolie abbesse[1] : vous savez que c’est toujours son chemin de passer chez elle. Je vous envoie ce troisième petit tome des Essais de morale, dont je vous ai parlé[2] : lisez-le,