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1675en colère. Ce sont des gens qui reviennent de Versailles, et qui recueillent toutes ces ravauderies pour me les mander. Je ne sais rien du tout du présent allégorique de Quanto à M. de Marsillac.

J’ai trouvé votre parodie très-plaisante et très-juste ; je la chante admirablement, mais personne ne m’écoute : il y a quelque chose de fou à chanter toute seule dans un bois. Je suis persuadée du vœu de l’Évêque[1] dans la bataille : e fece voto, e fic liberato[2] ; mais voici la suite : passato il pericolo, schernito il santo[3]. Je crois qu’il est fort occupé de la teinture de son chapeau. Dieu merci, il n’aura pas le nôtre[4] ; il est bien cloué sur une meilleure tête que la sienne. Je ne sais pas trop bien ce que nous en pouvons faire ; mais je suis ravie qu’il nous soit demeuré. M. de Cossé hait le pape, et moi je l’aime.

Vous me parlez bien plaisamment de nos misères ; nous ne sommes plus si roués : un en huit jours, seulement pour entretenir la justice. Il est vrai que la penderie me paroît maintenant un rafraîchissement : j’ai une tout autre idée de la justice depuis que je suis en ce pays ; vos galériens me paroissent une société d’honnêtes gens, qui se sont retirés du monde pour mener une vie douce. Nous vous en avons bien envoyé par centaines ; ceux qui sont demeurés sont plus malheureux que ceux-là. Je vous parlois des états, dans la crainte qu’on ne les supprimât pour nous punir : mais nous les avons encore,

  1. L’évêque de Marseille. Voyez la lettre du 30 octobre précédent.
  2. Et il fit un vœu, et il fut sauvé.
  3. Le péril passé, on se moque du saint.
  4. C’est-à-dire celui de M. le cardinal de Retz. Voyez (ci-dessus) la lettre du 9 octobre (à Mme de Grignan, p. 166). (Note de Perrin.)