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1675au trictrac, au reversis : elle est assez belle, et toute naïve, c’est Jeannette ; elle m’incommode à peu près comme Fidèle. La Plessis a la fièvre quartaine : quand elle vient, et qu’elle trouve cette petite, c’est une très-plaisante chose que de voir sa rage et sa jalousie, et la presse qu’il y a à tenir ma canne ou mon manchon. Mais en voilà bien assez, voici un grand article de rien du tout. Ma chère enfant, parlons un peu de notre d’Hacqueville. Il est couru à Saint-Germain dès qu’il a su que Péruis[1] étoit arrivé. Il avoit envoyé mes lettres ; il n’y a point en vérité un autre ami de cette trempe ; mais le petit avocat qui porte toutes les défenses de vos amis n’est point arrivé. Cela l’inquiète fort, car que répondre contre des faits ? Mais à l’heure que je parle peut-être que tout est arrivé.

Les Fourbins ont une affaire de bien plus grande importance que celle-là, qui est celle du petit Janson[2], qui a

  1. Voyez tome III, p. 320, note 6 de la lettre du 18 décembre 1673.
  2. François-Toussaint de Forbin, fils aîné de Laurent, marquis de Janson (voyez tome II, p. 72, note 17), et neveu de l’évêque de Marseille. Il était né en 1655. — Il prit la fuite après ce duel, et se mit au service de l’Empereur. Il se trouva à la levée du siège de Vienne et à la prise de Bude. La guerre ayant été déclarée entre la France et l’Empire, il revint dans sa patrie, et se déguisa sous le faux nom de comte de Rosemberg. Le Roi, touché de cette marque de fidélité, ferma les yeux sur sa rentrée en France, et lui donna un grade dans un régiment étranger. Étant resté au nombre des morts à la bataille de la Marsaille, livrée le 4 octobre 1693, il fut porté par ses soldats chez les jésuites de Pignerol qui prirent soin de ses blessures, et commencèrent, par leurs exhortations, à lui inspirer la résolution qu’il prit dans la suite de se consacrer à Dieu. Il se rendit à la Trappe et y fit profession sous le nom de frère Arsène, le 7 décembre 1703. En l’année 1704, il fut du nombre des religieux que l’abbé de la Trappe envoya en Toscane sur la demande du grand-duc, pour rétablir l’ancienne observance de Cîteaux dans l’abbaye de Buon-Solazzo. Le cardinal de Janson alla l’y voir, et fut touché jusqu’aux larmes des discours de son neveu. Le frère Arsène mourut dans cette abbaye le 21 juin 1710. (Note de l’édition de 1818.)