Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 4.djvu/320

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 314 —


1676adonné pendant trois ans à une personne qui n’a pu s’accommoder de ce que je ne parlois pas en public, et que je ne donnois pas la bénédiction au peuple[1] ? Vous avez eu du moins grande raison d’assurer que ma blessure étoit guérie, et que j’étois dégagé de ses fers. Je.suis trop bon catholique pour vouloir rien disputer à l’Église. C’est depuis longtemps qu’il est réglé que le clergé a le pas sur la noblesse. Il m’est tombé depuis peu entre les mains une lettre de cette grande lumière de l’Église : il écrivoit à la personne aimée, et la prioit de répondre à sa tendresse par quelque marque de la sienne. Voici ce qu’il lui disoit : « Ne me refusez point, je vous prie, cette grâce, et songez que vous me rendrez un office singulier. » Cela n’étoit-il pas bien touchant ? J’écrivois encore mieux à Mme de Choisy. Je suis redevenu esclave d’une autre beauté brune dans mon voyage de Rennes. C’est Mme de ***, celle qui prioit Dieu si joliment aux Capucins : vous souvenez-vous comme vous la contrefaisiez ? Elle est devenue bel esprit, et dit les élégies de la comtesse de la Suze[2] en langage breton.

La Divine[3] est à nos côtés depuis neuf heures du matin ; elle nous a déjà conté les plus jolis détails du monde

  1. Voyez la lettre du 27 novembre 1675, p. 249, et celle du 8 avril 1676, p. 399 ; voyez aussi Walckenaer, tome V, p. 361.
  2. « Mme de la Suze, Henriette de Coligny, le dernier reste du sang du grand amiral, qui ne sut régler ni sa vie ni son talent, mais qui avait reçu le don de la poésie. » (M. Cousin, la Société française, tome II, p. 243.) Née en 1618, elle était morte le 10 mars 1673. Elle avait été mariée d’abord à un Écossais, Thomas Hamilton, puis au comte de la Suze, de l’illustre maison des comtes de Champagne. La première édition de ses poésies réunies à part est de 1666. Sans parler des recueils où l’on en avait publié antérieurement, il avait paru, deux ans auparavant, sous le titre de Pièces galantes, des morceaux de prose et de vers d’elle et de Pellisson.
  3. Mlle du Plessis.