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1676l’aime sincèrement. Vous voyez que mon écriture prend sa forme ordinaire : toute la guérison de ma main se renferme dans l’écriture ; elle sait bien que je la quitterai volontiers du reste d’ici à quelque temps. Je ne puis rien porter : une cuiller me paroît la machine du monde, et je suis encore assujettie à toutes les dépendances les plus fâcheuses et les plus humiliantes[1] : mais je ne me plains de rien puisque je vous écris.

La duchesse de Sault me vient voir comme une de mes anciennes amies : je lui plais. Elle vint la seconde fois avec Mme de Brissac : quel contraste ! Il faudroit des volumes pour vous conter les propos de cette dernière ; Mme de Sault vous plairoit et vous plaira.

Je garde ma chambre très-fidèlement, et j’ai remis mes Pâques à dimanche, afin d’avoir dix jours entiers à me reposer. Mme de Coulanges apporte au coin de mon feu les restes de sa petite maladie : je lui portai hier mon mal de genou et mes pantoufles. On y envoya ceux qui me cherchoient : ce fut des Schomberg, des Senneterre, des Cœuvres[2], et Mlle de Méri, que je n’avois point encore vue. Elle est, à ce qu’on dit, très-bien logée ; j’ai fort envie de la voir dans son château. Ma main veut se reposer, je lui dois bien cette complaisance pour celle qu’elle a pour moi.

  1. Dans les deux éditions.de Perrin : « et les plus humiliantes que vous puissiez vous imaginer. »
  2. Le fils aîné du duc d’Estrées porta sans doute jusqu’à la mort de son père (1687) le titre de marquis de Cœuvres. Il était frère de l’abbé d’Estrées, qui succéda à son oncle le cardinal d’Estrées comme évêque de Laon (1681), et il avait épousé Madeleine de Lyonne, dont il a été question au tome II, p. 305 et 331.