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1676M. de Pompone ces éclats de rire que vous connoissez. Mme Cornuel voyoit Mme de Lyonne[1] avec de gros diamants aux oreilles, et devant elle elle dit : « Il me semble que ces gros diamants sont du lard dans la souricière. »

Elle parloit l’autre jour des jeunes gens, et disent qu’il lui sembloit qu’elle étoit avec des morts, parce qu’ils sentent mauvais et ne parlent point.

Troisième bon mot. On parloit de la comtesse de Fiesque ; elle disoit que ce qui conservoit sa beauté, c’est qu’elle étoit salée dans la folie. Il y en a tant d’autres, qu’on ne finiroit point, et qui sont dits avec tant de négligence et de chagrin, qu’ils en avoient plus de grâce et d’agrément,

Vous savez peut-être bien que Mme de Montespan partit hier à six heures du matin pour aller ou à Clagny ou à Maintenon, car c’est un mystère ; mais ce n’en est pas un qu’elle reviendra samedi à Saint-Germain, pour en partir vers la fin du mois pour Nevers, en attendant les eaux. On parle fort du siège de Condé[2], qui sera expédié bientôt, pour envoyer les troupes en Allemagne, repousser l’audace des Impériaux qui s’attachent à Philisbourg. Les grandes affaires de l’Europe sont là. Il s’agit de soutenir toute la gloire du traité de Munster pour nous, ou de la renverser pour l’Empereur. Ce n’est pas que la beauté de la princesse de Bavière ne soit un point capital de nos démêlés : tous les princes à marier la prétendent, et nous verrons un jour quantité de ro-

    le commentaire de M. Paulin Paris, tome V, p. 132 et suivantes. On n’a de Mme Cornuel qu’une seule lettre adressée à la comtesse de Maure, portrait piquant du marquis de Sourdis ( voyez Tallemant des Réaux, tome V, p. 139).

  1. Voyez tome II, p. 305, note 6.
  2. Le siège de Condé était résolu dès la fin de l’année précédente ; la place fut investie le 17 avril par le maréchal de Créquy, et prise dans la nuit du 25 au 26.