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1676rhumatisme un peu difficile à persuader ; mais voici un chaud qui doit convaincre de tout. Je suis tellement en train de suer, que je sue toujours, et la bonne d’Escars n’ose me proposer d’ôter des habits, parce qu’elle dit que j’aime à suer. Il est vrai qu’il me reste encore la fantaisie de croire que j’ai froid quand je n’ai pas extrêmement chaud : cela s’en ira avec la poule mouillée, qui prend tous les jours congé de moi. Nous pensions être vendredi à Vaux[1] , et passer une soirée divine ; mais je crains que nous n’y soyons que samedi. Je vous écrirai encore, car c’est ma seule joie.

Mme de la Fayette me mande que Guenani est refichée[2] à Maubuisson[3], et qu’elle est aimable, sans être belle. Elle est vive, douce, complaisante, glorieuse et folle : ne la reconnoissez-vous pas, vous qui êtes une de ses plus anciennes connoissances ? Si vous eussiez cru qu’elle eût été en tiers, vous auriez augmenté votre pitié. Je ne sais pourquoi vous dites que cette histoire est répandue, je ne le trouve point ; je ne vois personne qui m’en parle : cela deviendra faux, comme mille autres choses. Le goût que Sa Majesté prend pour le métier[4] pourroit bien faire cet effet. Et qu’est-il que le temps, ne dissoude ? comme disoit Scarron. La pauvre bonne amitié est bien plus durable ; il est vrai que ce mot de passion éternelle faisoit peur à une certaine beauté du temps passé ; son pauvre amant lui protestoit, croyant dire des merveilles, qu’il l’aimeroit toute sa vie : elle l’assura que c’étoit pour cela seul qu’elle ne l’acceptoit pas, et que rien ne lui faisoit tant d’horreur

  1. Voyez la lettre du 1er juillet suivant, p. 505.
  2. Il y a est refrichée dans le manuscrit, est retournée dans la seconde édition de Perrin, et simplement est dans la première.
  3. Abbaye de l’ordre de Citeaux, près de Pontoise.
  4. Dans les deux éditions de Perrin : « Le goût que Sa Majesté prend au métier de la guerre. »