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comme on veut : c’est un homme à facettes encore plus que les autres.


556. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ
À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris, mercredi 8e juillet.

Vous avez raison, ma bonne, de dire que le sentiment de tendresse qui vous fait résoudre de venir tout à l’heure ici, si je le veux et si j’ai besoin de vous, me fait mieux voir votre cœur que toutes les paroles bien rangées : je vous l’avoue, ma bonne, et je ne vous puis dire à quel excès le mien en est touché ; mais comme vous lui donnez pour conseil la raison de d’Hacqueville, et que vous avez fait à l’égard de ce cœur dont il est question comme pour les régentes, qui ne peuvent rien faire sans un conseil, vous m’avez donné un maître en me donnant un compagnon (vous savez le proverbe), et persuadée que vous savez parfaitement comme je suis pour vous, et ce que c’est pour moi que de vous voir[1], et que de ne pas manger toute ma vie de la merluche[2], je vous dirai que nous regardons la fatigue de venir par les chaleurs et par la diligence comme une chose terrible, et qui pourroit vous faire malade. Et pourquoi cette précipitation pour une santé qui est beaucoup meilleure qu’elle n’a encore été ? Je marche, je mange, et il n’y a que mes mains qui me

  1. LETTRE 556. — C’est le texte des impressions de 1726 et de 1734. Dans son édition de 1754, Perrin a une leçon toute différente : « vous savez le proverbe. Hé bien ! ma fille, voici ce que le grand d’Hacqueville me dit hier de vous mander : il n’ignore point ce que c’est pour moi de vous voir, etc. » — Le proverbe est « Qui a compagnon a maître. »
  2. Voyez la lettre du 15 juin précédent, p. 491.