Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 4.djvu/538

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 532 —


1676santé. Je lui mande que je me porte très-bien hormis que je ne puis serrer la main ni danser la bourrée (voilà deux choses dont la privation m’est bien rude), mais que vous achèverez de me guérir. Il est vrai que j’ai encore un peu de mal aux genoux mais cela ne m’empêche point de marcher : au contraire, je souffre quand je suis trop longtemps assise. Vous ai-je mandé que je fus l’autre jour dîner à Sucy[1], chez la présidente Amelot[2], avec les d’Hacqueville, Corbinelli, Coulanges, le bon abbé ? Je fus ravie de revoir cette maison, où j’ai passé ma belle jeunesse : je n’avois point de rhumatisme en ce temps-là. Mes mains ne se ferment point tout à fait ; mais je m’en sers à toutes choses, comme si de rien n’étoit. J’aime l’état où je suis ; et toute ma crainte, c’est de rengraisser, et que vous ne me voyiez point le dos plat avec ma jolie taille. En un mot, ma bonne, quittez vos inquiétudes, et ne songez qu’à me venir voir. Voilà notre Corbinelli qui va vous rendre compte de lui. Villebrune dit qu’il m’a guérie ; hélas ! je suis bien aise que cela lui soit bon : il n’est pas en état de négliger ce qui lui attire des Vardes et des Monceaux[3] in ogni modo[4]. Vardes mande à Corbinelli que, dans cette pensée, il le révère comme le dieu

  1. Voyez la Notice, p. 21. — Sucy est un joli village à quatre lieues de Paris (entre Boissy-Saint-Léger et Ormesson), où Philippe de Coulanges, aïeul maternel de Mme de Sévigné, fit construire, en 1620, une belle maison qui relevait alors du franc-alleu noble de la Tour. C’est dans cette maison que Coulanges retrouva le vieux lit de famille sur lequel il a fait une chanson. Voyez ci-après la lettre du 16 juillet 1677. (Note de l’édition de 1818.)
  2. Voyez tome II, p. 61, note 2.
  3. M. de Moulceau (dont le nom est souvent écrit Monceaux et Mouceaux), président de la chambre des comptes de Montpellier, avec lequel Mme de Sévigné entretint plus tard une correspondance. Voyez la lettre du 17 avril 1682. (Note de fédition de 1818.)
  4. De toute façon.